L’autodérision, parfois, représente un piège. D’abord, elle suscite la sympathie puis le piège se referme et révèle une déstabilisation du premier ministre alors que la CAQ a connu la défaite dans Jean-Talon. Suivra une longue période marquée par une décision de rattrapage électoraliste irréfléchie. Nous aurons droit, depuis, à une série de décisions et de déclarations aux couleurs de l’amateurisme. Récemment, un ministre influant dans la filière économique nationale et possiblement internationale, dénonce haut et fort certains journalistes à qui finalement, il reproche de commenter des faits. De façon évidente, la gestion des communications et des interventions publiques de plusieurs porte-paroles du gouvernement de la CAQ témoigne d’un manque de coordination voire de cohésion ministérielle.
Le leadership de François Legault a pris un coup de vieux, à mon humble avis, irrécupérable. La lune de miel que se partageaient le premier ministre et une majorité de Québécois et Québécoises est définitivement terminée. Le lien de confiance maintenant effiloché, aucune annonce de nouveaux projets créateurs de milliers d’emplois ne pourrait ressusciter la lune de miel, ce qui n’est pas mérité, considérant une carrière politique jusqu’ici réussie. Un leadership à ce point affaibli, explique la suite ininterrompue des malheurs politiques du premier ministre, qui n’arrive pas à se remettre en selle. Monsieur Legault, qui a occupé des fonctions ministérielles très importantes au sein du Parti Québécois, après quoi, ambitionnant le poste de premier ministre, opta pour le nationalisme, délaissant le souverainisme. Ce faisant, après de nombreuses années dans l’opposition au Salon bleu, il atteignit son objectif avec une importante majorité qu’il verra considérablement augmenter au deuxième scrutin. Son parti (CAQ), alors, récoltant les plus hauts niveaux de popularité, le chef, en état de confiance inébranlable, fut fortement secoué et visiblement catastrophé par la perte brutale dans la circonscription de Jean-Talon, marquant le début d’une avalanche de coches mal taillées.
Je crois que François Legault est souverainiste de cœur et de raison, ce qui risque de l’affecter de nouveau lorsque le Parti Québécois procédera au lancement de son Livre Bleu. Dès sa parution, les plus farouches partisans québécois d’un fédéralisme à tout prix, seront tentés d’en faire un autodafé. Il semble bien que le Budget de l’an un (1) ait résisté à l’examen, pour reprendre une expression chère à feu M. Claude Ryan, successivement directeur du journal Le Devoir, chef du Parti Libéral du Québec (PLQ), président du Camp du Non au référendum de 1980. Dès sa parution, Le Livre Bleu sera contesté par les fédéralistes à tout prix et défendu par les souverainistes, heureux de voir enfin étalés à la vue de tous, ce que j’aime à qualifier de plans et devis d’un grand chantier, un grand Pays pour un grand peuple. À compter du jour de son lancement, jusqu’à l’ouverture des bureaux de vote en 2026, tous les médias du Québec publics et privés, communautaires, dans les deux (2) langues officielles, mettront à leur horaire des émissions ayant pour thème, la souveraineté du Québec. Il y aura débat.
Cette étape, de son mandat en cours, risque fort de situer François Legault dans une zone partisane qui pourrait l’entraîner, malgré lui, dans un nouvel épisode déstabilisant, susceptible d’achever sa baisse de popularité, invalidant de ce fait toute possibilité d’être réélu en 2026. En effet, je vois mal François Legault contredire les dispositions du Livre Bleu et faire l’éloge de la Fédération canadienne, qui aura déçu la majorité de ses vœux trop optimistes. Maintenant, quel sera l’accueil que les ministres réserveront à l’exercice pédagogique officialisé par la parution du Livre Bleu: demeurer silencieux, contester les arguments du PQ, appuyer fermement le Livre Bleu, les trois (3) options sont, à mon avis, possibles, lesquelles risquent de mettre à l’épreuve la sensibilité émotionnelle du premier ministre.
Pour tous, un heureux printemps !
Pierre Henri
Lundi, le 8 avril 2024, journée de l’éclipse du soleil,
Commentaire concernant Un coup de vieux,
Le point d’inflexion pour Legault et la CAQ s’est présenté dans la défaite de l’élection partielle dans Jean-Talon à Québec comme tu le mentionnes si bien. Depuis ce temps-là, c’est la débandade du parti. Pourtant, lorsque tu perds un député sur 90 qui siègent en chambre, le tapis ne devrait pas se dérober sous tes pieds. Tout indique que la CAQ se dirige vers le même scénario qu’a subi Robert Bourassa et les libéraux en 1976. En 1973, il récolte 110 sièges pour subir une défaite écrasante trois ans plus tard. Bourassa perd son propre siège. L’histoire risque de se répéter en quelque sorte.
En revanche, il y a un gros point d’interrogation dans mon esprit quant aux élections de 2026 au Québec. Je me demande comment François Legault va s’en sortir avec cette élection qui portera sur un oui/non concernant la souveraineté du Québec. Tout va dépendre du Parti libéral. Si ce dernier ne prend pas de galon d’ici ce temps-là, la CAQ pourra toujours s’en sortir sans être effacée de la carte électorale.
Bon éclipse,
MIchel Beauséjour